Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • La guerre aux bêtes (un été pourri)

     

     Qu’il fasse beau, qu’il vente ou qu’il gèle, qu’il pleuve sur les plaines ou que les plages brûlent, cet été 2013 est évidemment pourri. Pour les bêtes, dont les hommes n’ont rien à faire. Les animaux dégustent, autant qu’hier, peut-être moins que demain, et nul ne se lève pour les défendre. A part vous ? Oui, à part vous. Mais cela ne sera pas suffisant.

    Sus aux loups et aux louveteaux

    Vous qui aimez ces êtres, pardonnez à l’avance ce qui suit, car les nouvelles ne sont pas fameuses. On commence par une lettre adressée au préfet des Alpes Maritimes le 2 juillet 2013 par six associations, dont la LPO, l’Aspas, Ferus, France Nature Environnement (FNE), qui demande des éclaircissements. Le 18 juin, dans le cadre d’un plan d’État scélérat, des agents de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) ont buté une louve. Or elle était allaitante. Or elle allaitait probablement 5 louveteaux, qui ont fatalement rejoint, depuis, le vaste domaine où s’égaillent les loups assassinés.

    Les associations suggèrent au préfet de décompter les cinq louveteaux sacrifiés du total des loups - 24 - que le plan Loup prévoit de tirer. J’espère qu’elles ne m’en voudront pas, mais je ne supporte pas que l’on prête la main, fût-ce d’une manière aussi indirecte, à la décision étatique de tuer des loups, dont je rappelle qu’ils sont officiellement protégés par la Convention internationale dite de Berne. J’ai déjà dit ou écrit quantité de fois que le retour du Loup en France, après 1992, posait des problèmes, et que toute solution passait par des compromis.

    Je ne me suis jamais moqué des éleveurs, même si certains sont d’évidence de simples chasseurs de prime. Je suis pour le débat libre, mais de l’autre côté de la ligne de mire, il n’y a personne. La Confédération paysanne, en qui je plaçais des espoirs, se déshonore chaque jour un peu plus, qui réclame la peau du Loup chaque fois qu’un micro s’ouvre devant un responsable. Communiqué de la Conf’, en date du 22 mai, qui dénonce la : « pression insoutenable que produit la prolifération de l’espèce loup ». La biodiversité, c’est bon pour les peuplades. C’est bon pour les Africains, qui voient leurs cultures dévastées par des éléphants en mal de migration. C’est bon pour les paysans de l’Inde, dont plusieurs dizaines sont tués chaque année par les derniers tigres du pays. Pas pour nous, qui nous gorgeons de mots sans signification et de grandes envolées du haut des tribunes. Putain, comme les blablateurs me pèsent !

    Le 9 juillet, on apprenait que le préfet du Var recherche des tueurs spécialisés de loups, en Amérique du Nord ou en Russie.

    Ces si sympathiques paysans industriels

    J’ai croisé Christian Pacteau par l’intermédiaire de Générations Futures, une association de combat contre les pesticides, et je savais son engagement en faveur des busards dans le Marais poitevin, notamment autour de la baie de l’Aiguillon. Ces oiseaux nichent à terre, dans des prairies ou des champs, et sans le concours des paysans, il est difficile de sauver nombre de poussins. Une lame de fauche utilisée au mauvais moment détruit évidemment un nid qui se trouve au sol. Bref. Christian, dans un mail adressé au réseau Busards au début de cet été  :  « Vous connaissez tous les hécatombes de prédateurs, notamment du Milan royal en raison de l’usage de la bromadiolone (…) Les agriculteurs de la Baie (…) ont décidé, sans jamais proposer de dialogue à la LPO, de refuser de collaborer à la protection des Busards, donc de refuser la localisation dans les champs et, puisqu’ils sont propriétaires des chemins de remembrements payés à 50% au moins par le Conseil Général, d’interdire leur usage aux stagiaires chargés de la surveillance (…) Ce n’était pas toujours facile, cela devient impossible
    La nature n’est pas en sursis, sous nos yeux elle s’effondre »
    .

    Les loups et les busards ne sont pas seuls dans le collimateur. La Fédération des acteurs ruraux (FAR), lancée dans les Alpes en novembre 2010, veille. L’un de ses responsables, Joseph Jouffrey, est président de la Fédération départementale ovine (FDO) des Hautes-Alpes. Son genre à lui, c’est ça : « Alors que nous vivons en symbiose avec la nature nous voilà considérés comme des terroristes ». La faute au « néocolonialisme environnementaliste ». Mais ça devrait s’arranger dès que les loups et les ours auront été exterminés. Jouffrey ne dit pas ces derniers mots explicitement, mais je jure bien que l’esprit du monsieur n’est pas éloigné de la lettre.

    Sur le site internet de la FAR, en ce triste été, on trouve cet extrait d’un article du quotidien régional Le Dauphiné Libéré, en date du 10 juillet : « Entre colère et inquiétude à Plan-de-Baix dans le Vercors drômois. Hier mardi, une vache laitière qui venait de vêler dans une prairie à quelques mètres du domicile d’un exploitant agricole, a été attaquée, vivante, par 150 vautours. “Ils ont tout mangé, ils sont même entrés à l’intérieur !” témoigne l’agriculteur. “Ces vautours doivent crever de faim ! Mais qu’allons-nous faire avec nos bêtes”… ? »

    Et un autre, tiré d’un article du même journal, deux jours plus tôt, soit le 8 juillet. Nous ne sommes plus dans le Vercors, mais en Savoie : « Samedi, entre 13 h 30 et 14 heures, une génisse en pension au lieu-dit Fondorsol à Saint-Julien-Montdenis a été attaquée par une cinquantaine de vautours. Ces derniers ont réussi à l’isoler du reste du troupeau avant de se jeter sur l’animal âgé de deux ans. Des vététistes passant à proximité ont assisté à l’attaque, mais ils n’ont rien pu faire, à part prévenir les propriétaires se trouvant plus bas, en train de faire les foins. Ces derniers ont signalé l’attaque à la Direction départementale des territoires de Savoie ».

    Les « déificateurs » du monstre

    Et encore d’autres extraits, d’autres journaux, rapportant les mêmes histoires de vautours découpant, au rasoir de leur bec, vaches et veaux, en attendant les tendres bébés aux joues rondes, victimes toutes désignées des futures agapes. Une randonneuse de 53 ans, tombée en avril dans un ravin pyrénéen, n’a-t-elle pas aussitôt été dépecée par ces salopards ? Commentaire avisé de la FAR : « Les déificateurs de ce prédateurs tous comme l’administration qui les autorise a créer et entretenir une surpopulation de prédateurs sont responsable de ces attaques ». Je ne me suis pas permis de retoucher, car je tiens à ma peau de « déificateur ». Où l’on voit en tout cas que les vautours feraient bien de planquer leurs miches, car il s’agit comme il se doit de les éliminer.

    Faut-il vous faire un dessin ? J’en doute. Les ennemis des bêtes retrouvent, intacte, leur haine du sauvage et de tout ce qui échappe à leur délétère emprise. Ils ne tarderont pas à planter les rapaces nocturnes sur leurs granges en polystyrène. Enfin, ils trouveront autre chose, car tout de même, ne sont-ils pas nos vrais « progressistes » ? Comment voulez-vous que les vautours, conformés par l’évolution pour être des charognards se mettent à tuer des animaux vivants ? C’est inepte, contraire aux connaissances de base, mais que s’en foutent les abrutis ? Il s’agit de montrer qu’on en a, n’est-ce pas ? Que l’on ne va pas se laisser emmerder par des écolos-des-villes et des animaux-des-champs. Qui commande la nature, dites-moi donc ?

    En conséquence directe, ce n’est pas à ces dangereux crétins que je m’adresse, mais à vous. Le Vautour fauve, réintroduit à si grand-peine en France - je m’incline au passage devant la ténacité des frères Jean-François et Michel Terrasse - compte quelques centaines d’individus, et c’est de loin le plus nombreux dans nos ciels. Le Vautour moine, le Percnoptère, le Gypaète barbu - les trois autres espèces vivant en France - ont des effectifs dérisoires. Et il leur faut échapper aux lignes à haute tension, aux pesticides, aux chasseurs fous, beaucoup moins rares qu’eux. Vous trouverez au bas de cet article un commentaire avisé du grand naturaliste Roger Mathieu, auquel il n’y a rien à ajouter. Et poursuivons ce chemin de croix.

    Un si joli terrier artificiel

    Philippe Charlier - merci ! - m’envoie un compte-rendu de l’Assemblée générale de la Fédération des chasseurs de la Nièvre, qui date d’un an. Elle s’est en effet tenue le 5 mai 2012, mais le texte n’en a, semble-t-il, jamais été rendu public. On va donc y remédier, mais avant cela, sachez que le maire-adjoint de Nevers, Christophe Warnant, a ouvert cette belle séance sur des mots d’anthologie. Voici : « Nous faisons annuellement appel à vos services. Nous allons le faire prochainement pour éliminer les oiseaux qui sont en trop grand nombre dans cet espace urbain ». Bienvenue à Nevers, ville socialiste, et merci à Christophe Warnant, vaillant militant du parti au pouvoir.

    Donc, cette assemblée générale. Intervention tout en beauté de madame Émilie Philippe, secrétaire de l’association Vénerie sous terre. Pour ceux qui ne connaissent pas ce délicieux passe-temps, je précise que la vénerie sous terre consiste à acculer dans leurs terriers des animaux comme le Blaireau ou le Renard, par exemple à l’aide de chiens entraînés. Puis de les sortir de force, par exemple à l’aide de pinces. Puis de les tuer. Puis de s’embrasser pleine bouche en essuyant le sang qui coule.

    Ce jour d’assemblée, madame Émilie Philippe a besoin d’un coup de main. On ne parle pas assez des soucis et tracas des équipages de vénerie. Voyez-vous, et c’est madame Émilie Philippe qui parle, « nous recherchons une bonne âme, habitant à proximité, qui accueillerait un couple de renards ». Voilà qui est bien mystérieux si l’on ne connaît pas le reste. La suite : « Nous avons pour projet la mise en place d’un terrier artificiel, pour que toute personne qui le souhaite vienne entraîner ses chiens, c’est un outil qui manque cruellement ». Ces excellentes personnes font donc prisonnier un couple de renards, de manière que leurs chiens puissent les terroriser, dans un terrier artificiel, le temps d’un nécessaire apprentissage. En deux mois, conclut madame Émilie Philippe, « à deux équipages, nous avons déjà comptabilisé une centaine de renards ». Vous aurez probablement remarqué l’euphémisation de l’assassinat, qui devient par extraordinaire un simple acte comptable. Les vrais tueurs ont toujours trouvé des mots de remplacement pour décrire leurs activités.

    Les tigres fantômes du parc Jim Corbett

    Est-ce tout ? Encore deux bricoles. Le journal indien Down to Earth - ohé ! Laurent Fournier -  publie une enquête formidable et désastreuse sur le sort fait aux tigres sur le territoire du parc national Jim Corbett, le plus ancien du pays. C’est long, et en anglais (ici). Également en anglais, une chronique du grand journaliste britannique George Monbiot, que je ne lisais plus depuis un atroce papier sur le nucléaire qu’il avait commis. Je m’y remets, apparemment. Dans ce texte (ici), Monbiot constate cette évidence que les défenseurs de la nature ont très souvent baissé pavillon, et se contentent des miettes et confetti qui leurs sont concédés. Son titre : « The Naturalists Who Are Terrified of Nature ».

    Enfin, un très remarquable effort de l’association Robin des Bois, qui lance un trimestriel consacré au « braconnage et la contrebande d’animaux » (lire-ici.pdf). Que vous dire d’autre ? Si même nous n’étions que dix à défendre nos frères les animaux, il faudrait encore se lever pour eux. Or nous sommes un peu plus, et cela ne se sait pas assez. Savez-vous ? Je vomis ces barbares, et leurs innombrables soutiens. Comme dirait l’autre, on ne lâche rien. Ni personne. Pas la moindre libellule. Pas le dernier des orvets. Pas un seul ver luisant. Nous avons raison, car la vie est un principe supérieur à la mort qu’ils répandent.

    __________________________

    Les explications du naturaliste Roger Mathieu sur les vautours :

    Pour ceux qui veulent essayer de comprendre et ne pas mourir idiots, voici “comment ça marche” :

    Pour se nourrir, la plupart des organismes vivants répondent à des stimuli. Concernant les vautours, le stimulus majeur est l’immobilité totale et prolongée d’un animal avec absence de réaction lors des manœuvres d’approche des oiseaux. Ce comportement est celui d’un cadavre. Un animal sain et en pleine possession des ses moyens laisse les vautours indifférents et n’a rien à craindre.

    Entre ces deux scénarios classiques, Il existe des circonstances exceptionnelles qui leurrent les vautours et les incitent à se poser. Le comportement anormal d’un animal immobilisé, incapable de se mouvoir à l’approche des oiseaux et présentant des plaies importantes ou des saignements peut déclencher l’intervention des vautours. Ces stimuli se rencontrent, par exemple, à la suite d’une mise bas particulièrement difficile d’un animal allongé, isolé, et incapable de se mouvoir. Dans ces circonstances et en l’absence d’intervention humaine les vautours peuvent intervenir et entraîner la mort par hémorragie. S’agissant d’animaux domestiques, ces faits qui supposent l’accumulation de facteurs défavorables, sont rarissimes.

    Un peu plus fréquents sont les interventions des vautours ante mortem sur des animaux couchés, incapable de se mouvoir, victimes de blessures graves ou d’une pathologie avancée ou aiguë ( entérotoxémie bovine par exemple). Dans ces cas, les vautours ne font qu’anticiper la mort d’animaux condamnés. Ces scénarios exceptionnels ne peuvent s’apparenter à des comportements de prédation. Le comportement de prédation  sous entend qu’il existe une volonté délibérée du prédateur de mettre à mort sa proie avant de la consommer ; le stimulus déclenchant la prédation est précisément le mouvement de la proie.

    A l’inverse, dans le cas des vautours, le stimulus est l’immobilité absolue de l’animal cible (animal mort) ; les cas d’intervention ante mortem se produisent sur des animaux qui, par leur immobilisme et leur absence de réaction, leurrent les vautours, les incitent à consommer, entraînant la mort par hémorragie « sans intention de la donner ».

    Roger Mathieu

  • Le jour où j'ai tué une souris..

     

    20070706222125!Souris.jpg

    Vaches, veaux, cochons, canards: par milliers, braisés, épaules, brochettes, j'en mangeais. Bien sûr, je n'avais pas à les tuer. Que quelqu'un le fasse pour moi, en nettoie le sang coagulé, me brûle les plumes témoins de vie passé, je trouvais ça normal. Pas répugnant, à peine.

    Et puis j'ai tué une souris. La tapette l'avait tout juste assommée. Quelques gouttes de sang sur le plancher, et voilà une souris qui au lieu de filer sans demander son reste, se colle entre vos pattes, tremblotant, petite boule de poils quasi immobile, à peine soulevée par un souffle ténu de vie, pff pff pff, elle navigue à vue troublée, se cogne contre le canapé, attend que je l'achève?

    Petite souris! Pardon! Petite souris, non, je ne veux pas te tuer, la tapette aurait dû le faire sans que je le voie! Petite souris, ton halètement dit-il que tu souffres? Parle, couine, dis quelque chose!! (d'où mon intérêt pour le langage, qui a le mérite de nous permettre d'exprimer ce qu'on veut, si on le sait, et là où on a mal).

    Je t'aime, petite souris, continue de vivre à mes côtés, d'ailleurs pourquoi met-on des tapettes, que nous font-elles à part des petits trous dans nos affaires? C'est quoi un trou dans une serviette, une crotte de rien du tout, mignonne comme un bonbon, dans une casserole, à côté de la vie d'une souris?

    Je l'ai laissée vivre une nuit. Vis, petite souris, le sang n'est rien, une nuit et tu seras sur pattes.

    Le lendemain, la souris gisait là, vivotant, respirant faiblement. Misère! Que faire? L'achever? Ôter la vie de la souris? Finir le job de la tapette?
    Les animaux souffrent-ils? Carnivore hypocrite, toi qui manges des boeufs entiers, foies de canard, convoque donc tes foutus gènes préhistoriques et achève-nous cette souris sans fausse compassion!

    J'ai tué la souris. D'un coup violent, plein de désespoir, mains tremblantes, pour être raccord avec ma vie de carnivore.

    Pourvu que les animaux ne souffrent pas (trop).

  • Être vegan est si gay...

    mardi 23 juillet 2013

    Être vegan est si gay

    Le texte ci-dessous a initialement été publié en anglais le 16 mars 2011 sur le site GirlieGirlArmy. Ari Solomon est directeur de la communication pour l’association Mercy for Animals. Il contribue également au Huffington Post.

    Je suis gay. Et je suis aussi vegan. Pour la plupart des gens, les deux choses n’ont aucun rapport. Pour moi, le lien est évident.

    Quand j'étais enfant, j'étais brutalisé à l'école en raison de ce que j'étais. Moi, je ne savais pas exactement en quoi j'étais différent mais, apparemment, tous les autres le savaient. Je me souviens encore de la peur et de la tristesse que je ressentais dans le couloir qui menait à la cour où on était rassemblés tous les vendredis, et où j'étais harcelé par les crétins de la classe au-dessus de la mienne. Je n'en ai jamais rien dit – ni à mes parents, ni à mes professeurs, à personne. J’avais trop honte. C'est ainsi que personne n’a jamais pris ma défense, parce que je n'en ai jamais donné l'occasion.

    Vingt ans plus tard : je suis sorti du placard et me voilà marié et installé avec mon mari à Hollywood. Je suis engagé pour les droits des homos, et je défends avec passion l'idée d'égalité pour tous. Pour tous les humains, pour être plus exact. Puis, un jour, je suis dans mon canapé en train de regarder un talk-show à la télé. Parmi les invités, il y a Alicia Silverstone, qui dit être vegan. S'ensuit une conversation qui pique ma curiosité : Alicia dit qu'elle est vegan parce qu'elle aime ses chiens. Moi aussi j’aime les chiens… et les chats. Après l'émission, j'allume mon ordinateur, j'ouvre Google et je tape « Alicia Silverstone » et « vegan ». Ce que je découvre va bouleverser ma vie.

    Ce jour-là, pendant près de deux heures, je suis resté à regarder une multitude d'enquêtes menées en caméra cachée dans des élevages industriels. Comment est-il possible qu’en 30 ans, personne ne m'ait dit que c'est ainsi que les animaux deviennent notre nourriture ? J'ai vu les regards terrifiés sur leurs visages, les coups et les tourments qu'ils enduraient. J'ai vu des employés d'élevages dénués d'empathie leur hurler dessus. Et cela résonnait en moi parce que je savais ce que les animaux ressentaient. Je sais ce que ça fait d’être brutalisé.

    Je suis devenu vegan ce jour-là, parce que je ne supportais pas de payer des gens pour faire à ces animaux ce que l'on m'avait fait à moi – dans des proportions bien moindres. Comment aurais-je pu continuer à défendre l'idée que tout le monde mérite d'être traité avec égalité et d'avoir sa chance d'être heureux, tout en me nourrissant des restes d'animaux qui avaient été si mal traités et avaient vécu des vies aussi misérables ?

    Pour moi, le parallèle était évident : l'oppression égale l'oppression. Nous pouvons disserter sans fin sur les différences entre les humains et les animaux, mais au fond de nous-mêmes nous savons très bien que les animaux souffrent, et qu'ils mènent des vies riches en émotions qui ne sont pas bien éloignées des nôtres. Si vous avez déjà vécu avec un chat ou un chien, vous le savez mieux que quiconque.

    C’est pourquoi je suis vraiment attristé de voir tant de militants progressistes – y compris des homos – tourner en dérision le véganisme ou les droits des animaux. À l’automne 2008, mon mari et moi avons milité avec acharnement en faveur du « non » au référendum sur la proposition 8 [proposition d’interdiction du mariage entre personnes de même sexe] ici en Californie. Lors d'une soirée militante, l'un des responsables, un homo, est venu vers moi. Il voulait savoir pourquoi j’arborais un t-shirt pour les droits des animaux chaque fois que je participais à une action. « On a compris », dit-il, « tu es vegan ». Je lui ai répondu : « Non, tu n’as pas compris. Si c'était le cas, tu serais vegan toi aussi. »

    Ari Solomon

    Source : girliegirlarmy.com: The Glamazon Guide To Conscious Living

  • L’extrémiste..

    Parfois, quand des gens s’étonnent de constater ce que je mange ou ce que je ne mange pas, je réponds ceci:

    « Je suis extrémiste ».
    -Tu manges du poisson quand même?
    -Non. Je suis extrémiste. Je ne mange ni viande, ni poisson, ni oeufs, ni produits laitiers. Je n’achète jamais de cuir, de soie ou de laine. Tu vois, je suis vraiment extrémiste.
    -Ha bon…

    Comme vous le constatez, votre interlocuteur n’aura pas grand chose à répondre de plus que « ha bon » ou « ha d’accord », et ce même s’il n’est pas d’accord du tout et qu’il vous trouve très bizarre. Mais au moins, il ne vous accusera pas d’extrémisme, c’est déjà fait.
    Mais si je me dis extrémiste, ce n’est pas uniquement pour enlever aux autres le loisir de le faire à ma place. C’est parce que je pense que c’est un peu vrai. La question est plutôt: que veut dire être extrémiste? Est-ce mal?

    Certes, comme l’illustre Veggiepoulette, il n’y a rien d’extrémiste en soi à ne pas vouloir manger du fromage ou à choisir le coton plutôt que la laine. Et parfois, je trouve totalement ridicule qu’on considère comme extrémiste le fait que je veuille un repas constitué uniquement d’ingrédients végétaux, ce type de repas devrait selon moi être la norme

    C’est ce conditionnel que je prends et compte quand je m’accuse d’extrémisme. Cela devrait être la norme, mais ça ne l’est pas. La norme, c’est viande + garniture, et peu importent la logique, la souffrance des bêtes, la santé des humains, la destruction impitoyable de notre planète bleue, peu importe qu’on brûle notre propre maison. C’est la norme.

    Hé bien moi, je suis contre cette norme. Je suis donc extrémiste.

    P1030016

    Elevage non-extrémiste où tout est normal

    Les gens qui me taxent d’extrêmiste sont les gardiens de la norme sociale. Tout individu élevé dans cette société sera, à un moment où à un autre de sa vie, défenseur de la norme sociale, des valeurs qu’il a apprises, qui l’ont construit. On ne peut pas vraiment en vouloir aux gens pour cela.

    Même la plupart des gens qui défendent les animaux sont les gardiens de la norme sociale. La plupart des défenseurs des animaux mangent de la viande, et tiennent beaucoup à continuer. Ils ne remettent pas en question la norme sociale, ils ne sont pas extrêmistes. Ils souhaitent simplement que l’on traite bien les animaux (et pour beaucoup, ce n’est pas incompatible avec le fait de les tuer sans nécessité).

    Les vegans antispécistes ne veulent pas qu’on traite bien les animaux. Ils veulent qu’on ne les traite plus du tout. Que le bien-être et que la vie d’un animal ne soient plus dépendants du bon vouloir d’un être humain. Or, notre domination sur les autres espèces fait partie de l’ordre social. Contrairement à ce que prétendent les défenseurs de la norme, je ne pense pas qu’elle fasse partie d’un quelconque « ordre naturel », que nous soyons les maîtres des autres animaux parce que « dieu » ou « la nature » l’ont dit; mais cela  fait indéniablement partie de la norme sociale.

    Je refuse cette norme.

    Je dois avouer que j’ai même une certaine fierté à être extrémiste. Il faut avoir la force morale de s’opposer à la norme sociale. Je dois dire aussi que les non-extrémistes, les modérés, me fatiguent un peu. Marre des modérés. Marre des mous du bulbes qui s’empressent de dire que oui oui, ils mangent du poisson, ils sont pas extrémistes, merci pour eux. Non, ils ne veulent pas changer la société, elle est très bien comme elle est, c’est juste que, hum, hé bien, la viande, ils n’aiment pas trop ça, ils ne savent pas pourquoi… Ils n’imposeront pas un régime végétarien à leurs enfants bien sur. (ils leur imposeront de manger de la viande, mais ça, c’est normal). Ils n’ont rien contre la viande, c’est juste qu’il faudrait mieux traiter les animaux, faire du bio…

    Les modérés sont mous. Ils devraient selon moi apprendre à s’affirmer dans un monde qui est impitoyable pour les plus faibles. On ne peut pas être modéré pour tout. Sommes-nous modéré quand nous affirmons qu’abuser sexuellement d’un enfant est une mauvaise chose? Alors pourquoi devrait-on être modéré pour condamner des actes comme égorger un veau? Pourquoi devrait-on être modéré quand il s’agit de la souffrance d’être faibles qui ne peuvent pas se défendre, qui ne peuvent que subir?

    Par contre, je veux bien qu’on dise que je suis extrémiste, mais je refuse que l’on m’accuse d’intolérance. Au contraire, je suis tout ce qu’il y a de plus tolérante. Je tolère que des gens que j’aiment donnent leur argent pour que l’on tue et torture les animaux que j’aime; et ce n’est pas facile tous les jours. Tolérer ne veut pas dire cautionner, ne veut pas dire être d’accord. Je tolère parce que c’est la norme et que c’est comme ça. Et surtout, je ne juge pas. Je condamne fermement les actes, mais je ne juge pas les gens qui les commettent. Juger les gens est stérile. Juger les actes est nécessaire, pour un monde un peu plus juste.

    Et être extrémiste, c’est simplement vouloir un monde un peu plus juste, même si pour cela il faudra que la société évolue, et avec elle, ses sacro-saintes normes, qui ne sont autres que des conventions auxquelles se plient les gens. Sans réfléchir.



    Ce contenu a été publié dans Justices, Injustices par l'elfe, et marqué avec . Mettez-le en favori avec son permalien.